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Le souvenir : Prison du passé, liberté du futur

Par Elle adore

Ce soir, j’ai pris de l’âge, j’ai pris un soir

C’est l’histoire d’une confrontation inattendue, je viens de voyager à travers un sentiment frustrant, décevant, drôlement triste. C’est l’heure du souvenir.

C’est samedi soir, je suis chez moi, ma télévision allumée propose des programmes qui ne captent pas mon attention mais elle m’offre cet effet sonore dans l’ombre de ce moment.  Certainement un phénomène générationnel, je tiens mon téléphone dans la main puis d’un mouvement machinal je surfe sur mes réseaux sociaux. Dans l’ennui de cet instant, j’ouvre mon Instagram et m’octroie une rétrospective vers mes premières photos postées. Je trouve cette image, une jeune fille aux yeux ronds,

pétillants, elle porte de grosses boucles d’oreilles, une frange trop longue, son dos nu et son regard souriant promettent une belle soirée. Je tente de la retrouver sur Facebook pour mettre une date réelle à cette imposture, nous sommes en 2012 et cette fille c’était moi. Pour une raison qui m’obsède, les larmes remplissent mes paupières qui s’alourdissent et éclatent en sanglot !

Cette fille, c’était moi. Je la connais, elle était pleine de rêves et tellement spontanée ! Toujours cette envie de profiter de chaque seconde jusqu’à l’aube. Elle était sage cette jeune fille mais elle aimait la fête, le champagne et ses ami(e)s. Pourquoi je continue à la nommer alors qu’il s’agit de moi.

Je viens de réaliser que le passé ne se conjuguera plus au présent. Je me dirige vers mon miroir avec l’espoir de la reconnaître. Mon mascara dégouline sur mes joues et malgré les tentatives je n’arrive pas à m’identifier à ses traits. Il y a ce je ne sais quoi qui me tourmente, cette nostalgie de retourner dans ce moment précis et de revivre cette enthousiasme festif. Est-ce la fête qui me manque ? Non, c’est ce visage. Cette petite fille a voulu écrire son histoire, me voilà au présent en train de la lire sur mon nouveau visage. Je sais bien qu’il est impossible de s’offrir un aller simple dans le passé mais j’ai envie de crier au désespoir car elle me manque.

Lorsque j’avais 13 ans, je rêvais consciemment de cette liberté d’en avoir 18. J’ai figé mon adolescence pour déployer toute mon énergie à la majorité. Arrivée à destination, mes bagages psychologiques étaient au rendez-vous comme prévu. Naturellement, j’ai pris mon envol pour exaucer mon voeu. Puis, il y a eu ces années folles où l’aventure sociale et professionnelle m’a tellement enchanté ! Aujourd’hui, je suis ailleurs mais le futur me fait peur. Je viens de l’apprendre car ce sentiment de nostalgie est effrayant. J’ai toujours aimé retourner dans ce joli monde du souvenir mais à ce jour il me déstabilise.

 Prendre de l’âge, c’est donc ça ? Ou bien la peur de vieillir ? Je ne suis qu’à un tiers ou un quart de cette vie que l’on me propose à la traîne de ce que je décide mais je suis déjà confrontée à la douleur du souvenir. Je prends conscience qu’il sera éternellement marqué dans ma mémoire, mon visage, mon corps.

Chaque jour, je tente en vain d’imaginer un futur merveilleux à la hauteur de la pureté de mon rêve. Quelle audace ! J’ai osé me mentir en oubliant mon passé mais il sera là pour toujours. J’ai souvent eu cet altruisme de me mettre à la place des personnes âgées, quelle prétention d’avoir cru comprendre. Nous écrivons tous notre histoire, le beau bébé dans son berceau deviendra pubère, adulte puis âgé.

Si réflexion il y a alors nous sommes tous déjà âgés, enfermés dans la prison du passé et libre d’écrire le futur qui s’ouvre à nous.

Après lecture de ce sentiment, je prends quelques instants de ce moment pour regarder ce visage  actuel qui se reflète dans ce mur miroitant. Surprise ! Elle est bien là cette petite fille aux yeux ronds, cette gamine qui s’impatiente à l’ouverture de son présent, ce rêve fou qu’elle avait imaginé avec son esprit d’enfant, elle l’attend pour le réaliser. Je sauvegarde cette émotion dans ma boîte sentimentale et je donne de l’espoir à la fin de ma soirée, à demain, aux nouveaux jours !

Un livre s’écrit puis se relit. Il ne tient qu’à nous d’écrire ses prochains récits. 

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Bien écrit

Lindouda - Le 19/12 à 00:00  Signaler un abus
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