L'être humain est complexe. Et selon certains, la femme en serait la forme la plus aboutie... Plus que complexe, elle est tordue.Pas de doutes, je suis une femme. Toute en contradictions et ambiguïté. Une affirmation qui justifie le billet d'avion que je tiens entre mes mains : Paris Split, aller-retour pour la Croatie.
Je m'explique.
Je n'aime pas faire comme tout le monde. Les effets de mode me filent le bourdon. Mais j'aime aussi tout essayer, pour tout comprendre. Deux traits de caractère qui ne s'accordent pas toujours... Heureusement, mes petites luttes intérieures ne durent jamais longtemps : mon esprit de contradiction capitule fissa devant ma curiosité.
La Croatie a le vent en poupe.
Une tendance qui ne date pas d'hier, à en croire mes ex-soixante-huitards de parents. Oui mais. Je m'interroge.Entre-temps, l'eau rouge n'a-t-elle pas coulé sous les ponts ? La Croatie est-elle une valeur sûre ? Mérite-t-elle les éloges qu'elle suscite ?...
J'ai la tête dure, mais je ne suis pas butée. Je pars donc vérifier.
Mon cap, l'île de Pag :
En bon agent double du tourisme, je dois d'abord me trouver une planque digne de ce nom. À deux pas des spots les plus prisés, mais suffisamment en retrait pour débriefer à tête reposée. Sur les mille et une îles croates, mon doigt pointe celle de Pag sur la carte routière. À 183 Km de Split et un pont de Zadar. Je mets donc le cap sur ce croissant d'île à la beauté lunaire.
Armée de mon esprit critique et de mon appareil photo, camouflée sous une petite robe à fleurs, ma mission peut commencer.Mes quartiers, la Vila Ankora :
J'ai trouvé le repaire idéal. À l'entrée de Pag, dans le bourg de Miskovici. De ma chambre, j'ouvre les rideaux sur une mer profonde et huileuse, dans laquelle se contemplent des monts dorés. Une vue qui invite aux bains de mer et au farniente. Mais je ne peux pas rester en place...
De la terrasse du restaurant, un étage plus bas, le bleu de l'eau paraît plus vif et le soleil donne au paysage des reflets argentés.
L'ambiance familiale m'incite à étirer mon petit-déjeuner sur la lecture d'un bon bouquin.
Mais je ne peux pas rester en place ! Si je me répète, c'est pour ne pas céder. La tentation est forte, mais pas le temps de lézarder : j'ai une contre-enquête à mener et des ouï-dire à éprouver. Il me faut filer sans tarder. Le métier de journaliste implique sacrifice et don de soi, ce n'est pas une sinécure... D'un pas ferme, je remonte quatre à quatre enfiler mon deux-pièces. Et redescends aussi vite piquer une tête. Esprit de contradiction quand tu me tiens..." Après tout, personne n'en saura rien " me dis-je, en plongeant dans l'eau salée.Mon quadrillage de périmètre, Krka, Sibenik et Pag
Les fesses encore mouillées, je prends place dans ma machine de guerre, une C1 rouge pétante.
Si indécent, le rouge. Et si peu discret. J'adore. Je lèche délicieusement mes lèvres encore salées et fait vibrer le moteur de mon engin. Dès cet instant, la machine de guerre, c'est moi : j'en ai trop entendu sur la région, il est temps de me forger ma propre opinion.